La dame Dacier

6 décembre 2022
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Image : Illustration Edito décembre 2022
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Amis des Classiques, soyons inoxydables !

Dans le mythe des âges, Hésiode évoque le destin des hommes en les comparants à des métaux. À l’or du temps de Cronos, succède l’argent qui charrie le mal, la douleur et la démesure, puis le bronze de la guerre et enfin le fer friable du déclin, l’âge usé dans lequel nous vivons. Entre les deux derniers, l’âge des héros dont Hésiode ne précise pas de quel métal il est fait. L’alliage pourrait tout a fait être d’acier, car si le XXe siècle a connu, pour le pire et parfois le meilleur la dame de fer, le XVIIe a mis au jour la dame Dacier, Anne de son prénom, héroïne de la culture grecque et de sa transmission jusqu’à nous. 

La légende rapporte qu’Anne aurait appris le grec et le latin en écoutant les leçons que son père Tannequille donnait à son fils, qui malgré beaucoup d’intelligence, comme beaucoup d’hommes de son temps, ne jugeait pas nécessaire que sa fille soit éduquée à autre chose que les travaux d’aiguille. Il eut pourtant l’éclair de lucidité  — lancé par Athéna ou Anne elle-même — voyant le talent naissant de sa fille non seulement de l’éduquer mais d’en faire son bras pour les très nombreuses éditions de textes grecs qu’il proposa. À l’époque, les traductions se font en latin, ce qui est très impressionnant mais accessible aux fins lettrés. Mais Anne Dacier a l’enthousiasme et l’audace de traduire en français afin que la beauté des textes sortent du cénacle littéraire, tout en gardant le texte grec et ses notes de commentaires : Anne Dacier venait d’inventer l’ancêtre du Budé qu’elle signe en son nom propre. Après Anacréon et Sapho, elle s’attèlera à quantité d’auteurs : Aristophane, les Tragiques et réalise l’incomparable prouesse de traduire à la fois l’Iliade et l’Odyssée. Héroïne de grec, elle est également une héroïne de l’émancipation féminine, à tel point qu’en 1951 le magasine Wonder Woman lui consacre tout un épisode : https://madamedacier.huma-num.fr/Portraits.

Amis des Classiques, soyons inoxydables pour ne jamais laisser la passion du grec et du latin s’émousser !